Les négociations préparatoires à un futur traité international garantissant les droits fondamentaux de l’environnement ont accouché d’un texte sans substance. Une poignée de pays, dont les Etats-Unis, le Brésil et la Russie, ont fait barrage à l’adoption de principes juridiques contraignants..
C’est un mauvais signal pour la protection de la planète qui vient d’être envoyé depuis Nairobi. Les négociateurs des près de 120 pays réunis au sein du groupe de travail mandaté par l’ONU dans la capitale kényane pour trancher sur l’opportunité de mettre en oeuvre un pacte mondial pour l’environnement se sont entendus sur bien peu de choses. Le contenu du texte examiné jeudi n’avait plus aucune substance par rapport au « papier » initial sur lequel les discussions s’étaient engagées lundi.
Au point qu’il était impossible d’aller plus loin et de préparer la suite, à savoir la préparation immédiate d’un comité préparatoire à l’organisation d’une conférence internationale fondatrice de ce pacte en 2021. «On a loupé une occasion. On en retrouvera pas d’autre avant cinq ou six ans », déplore Yann Aguila, avocat à Paris et co-artisan de ce projet repris par Laurent Fabius, ancien président de la conférence de Paris sur le climat, et défendu par Emmanuel Macron sur la scène internationale.


Un projet à valeur universelle
Dans l’idée de ses initiateurs, un réseau international de juristes , il s’agit de garantir à la nature des droits fondamentaux universellement reconnus, à l’image des droits de l’homme. Les juridictions de chaque pays, mais aussi leurs législateurs et les ONG, auraient la possibilité de s’appuyer sur les principes édictés dans ce pacte pour faire avancer la cause de l’environnement de façon très pertinente. Beaucoup plus que ne peut le faire la déclaration de Rio de 1992.
Le texte à l’étude égraine ainsi 20 principes déjà en vigueur en totalité ou en partie dans différents pays. Y figurent notamment les principes de précaution, de pollueur-payeur, d’information du public, de résilience, de prévention ou encore de réparation des dommages causés à l’environnement.


Six Etats hostiles
Une démarche à laquelle une centaine de pays ont déclaré vouloir adhérer mais qui ne fait pas l’unanimité, comme il est de règle dans les délibérations des assemblées onusiennes. A Nairobi, les représentants de six Etats s’y sont opposés en tête desquels les Etats-Unis, notamment suivis par le Brésil, la Russie et l’Egypte, « souvent avec virulence », regrette Yann Aguila. A force de le torpiller à coup de formules édulcorantes, ces pays ont fini par faire couler le projet de pacte dans son essence même. Au final, les discussions ont débouché sur une déclaration politique, sans réelle portée.
Le renflouement de cette initiative ambitieuse n’est cependant pas chose impossible. Elle pourrait commencer à refaire surface dans le cadre des grandes conférences sur l’environnement que les Nations-Unies organisent tous les 10 ans (Stockholm en 1972, Rio en 1992, Johannesburg en 2002, Rio + 20 en 2012). La prochaine doit se tenir en 2022.
(Les Echos 26/05/2019)