Un incident à son domicile en fin de semaine fait le jeu de ses adversaires qui questionnent la personnalité du député et sa capacité à diriger le pays.
Encore une fois, la question de la personnalité de Boris Johnson est au cœur des débats alors qu’il semble si près d’assouvir son ambition politique. Menant la course pour succéder à Theresa May et réaliser, avant le 31 octobre prochain, la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, la capacité à gouverner du député Tory est mise en doute à cause d’une querelle domestique.
La presse dominicale britannique a fait feu de tout bois après l’incident qui a valu l’intervention de la police au domicile de Boris Johnson dans la nuit de jeudi à vendredi. Après avoir entendu les cris d’une dispute, des voisins ont appelé les forces de l’ordre faute d’avoir pu obtenir une réponse après avoir frappé à la porte de l’appartement. Selon le témoignage de voisins, la compagne de Boris Johnson, Carrie Symonds , 31 ans, lui aurait demandé de « s’éloigner d’elle » et de « quitter l’appartement ». Elle lui aurait également reproché, après qu’il a renversé du vin rouge sur son canapé « d’être trop gâté » et « de n’accorder aucun prix aux choses ». Les policiers sont repartis et ont expliqué plus tard dans un communiqué que rien n’avait justifié une action de la police.
Pas d’explications
Cela tombe évidemment au plus mal pour le candidat conservateur au poste de Premier ministre. Personnage fantasque et désinvolte, coutumier des scandales, profondément opportuniste, sa gouaille ravageuse lui a conquis un large public auprès de la base des conservateurs. Largement en tête à l’issue du vote des parlementaires de son camp, il doit être élu par les membres du parti d’ici la fin juillet. Samedi, lors du premier des seize débats qui doivent l’opposer à son adversaire, le chef de la diplomatie britannique Jeremy Hunt, Boris Johnson a refusé de s’expliquer sur cet incident.
Du pain béni pour le ministre des Affaires étrangères qui fait de la personnalité de Boris Johnson le centre de ses attaques. Les alliés de Jeremy Hunt soutiennent que sa vie privée (maîtresses, enfant illégitime…) en fait un risque sécuritaire et qu’il peut devenir la proie de maîtres chanteurs. L’ancien secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Alan Duncan, a expliqué au « Guardian » que Boris Johnson avait fait preuve de « manque de discipline » durant toute sa carrière. Preuve que la question de la personnalité du député est centrale, « The Economist » titrait la semaine dernière : « Quel Boris pour la Grande-Bretagne ? », avec en couverture son visage mi-clown, mi-sérieux.
Les conseils de Steve Bannon
Un sondage de Survation pour le « Mail on Sunday » a montré un renversement de tendance dès cette fin de semaine. Devançant de 8 points son adversaire jeudi dernier, Boris Johnson se retrouvait 3 points derrière samedi (29 % contre 32 %) dans un sondage réalisé auprès d’électeurs conservateurs pour savoir qui ferait le meilleur Premier ministre.
Carrie Symonds, qui a été dans le passé en charge de la presse pour le parti conservateur, s’est avérée ces derniers mois être une conseillère habile pour Boris Johnson. Une séparation serait vue comme un élément négatif pour l’homme politique. L’incident qui les a opposés, peut-être trivial, n’a pourtant rien d’anodin. Les observateurs politiques ne s’y trompent pas. « Tous les paris sont suspendus », a twitté le rédacteur en chef du « Financial Times », Lionel Barber, vendredi, après les révélations du « Guardian ». Dimanche, « The Observer » a ajouté un autre élément au débat avec une vidéo où Steve Bannon, l’ancien conseiller de Trump, explique comment il a pu conseiller l’ancien maire de Londres à l’occasion de son discours de démission du ministère des Affaires étrangères où il avait éreinté Theresa May. Une affirmation démentie à l’Observer par un porte-parole de Boris Johnson.
(Les Echos 23/06/2019)