A Washington, les ministres des Finances du monde entier n’ont pu que constater le ralentissement de la croissance et la montée des risques pesant sur l’économie mondiale. Chacun veut se persuader que la situation va s’améliorer alors que les périls sont plus que jamais menaçants.
Les réunions à Washington au siège du Fonds monétaire international (FMI) se suivent et se ressemblent d’année en année. Dans la capitale américaine, des centaines de ministres, gouverneurs de banques centrales et de conseillers y débattent des grandes problématiques économiques et financières mondiales sans que cela ne débouche sur des actions concrètes. Au terme de la semaine qui vient de s’écouler , il reste la fâcheuse impression que tout le monde croise les doigts pour que la situation ne dégénère pas plus et qu’une déflagration mondiale n’interviendra pas. C’est le syndrome du défenestré où un être humain qui vient de sauter du haut d’un gratte-ciel se dit, étage après étage : « jusqu’ici tout va bien ».
Prégnance des antagonismes nationaux
Il ne pouvait en être autrement tant les antagonismes nationaux sont prégnants. Seule une crise majeure, comme celle de 2008, est capable de faire bouger de manière décisive les lignes et de déclencher un réel élan de coopération internationale. C’est loin d’être le cas aujourd’hui. Encore moins avec une administration américaine qui n’a que faire du multilatéralisme et qui entend se concentrer sur ses propres affaires.
De plus, les Etats-Unis connaissent actuellement leur plus longue période de croissance ininterrompue. Le secrétaire au Trésor américain, Steven Mnuchin, a d’ailleurs pressé les autres pays d’agir « résolument » pour doper la croissance mondiale en agissant notamment sur le commerce. Justement, sur le plan commercial, les ministres espèrent que Washington et Pékin trouveront enfin un terrain d’entente. Ce qu’a laissé entrevoir le secrétaire au Trésor américain, Steven Mnuchin.
Fracture entre Américains et Européens
Mais une autre fracture entre Américains et les Européens risque de s’élargir. En raison du conflit Airbus-Boeing et aussi sur l’automobile, Donald Trump devant se décider mi-mai s’il taxe les importations européennes. Il n’y a guère que sur la fiscalité internationale que l’on puisse entrevoir un début de solution pour taxer les géants du numérique. Un accord n’est pourtant pas attendu avant l’an prochain.
Les tensions commerciales demeurent , l’endettement public et privé continue de croître au niveau mondial et les travaux de réformes du système commercial tardent. Face au manque de moyens budgétaires, les pressions politiques sur les banques centrales s’accentuent pour qu’elles fassent plus. Que ce soit par une baisse des taux ou par l’achat de titres de dettes publiques. Au fil des années, le modèle de croissance mondiale fondé sur l’endettement persiste. Dans ses rapports, le FMI le dit à demi-mot.
Manque de réaction coordonnée
Si les Etats-Unis affichent encore une conjoncture robuste, tel n’est pas le cas de l’Union européenne, du Japon, voire de la Chine. Le FMI a encore dit que l’Allemagne et les Pays-Bas disposaient de marge de manoeuvre budgétaire. Ils devraient accroître leurs investissements. Pour l’heure, l’Europe est bien le parent pauvre de la conjoncture mondiale. Incertitudes sur la politique italienne, effets induits d’un Brexit qui tarde à se dessiner et montée des populismes entravent sérieusement la capacité de réaction des Européens. Quant au Japon, toujours engoncé dans une crise qui dure depuis près de trente ans, ses marges de manoeuvre y sont aussi limitées.
Chacun se débat donc dans ses propres difficultés qui sont loin d’être surmontées. En zone euro, ainsi, l’union bancaire et des marchés de capitaux demandée de longue date par le FMI reste à faire. Comme de coutume, la montée des périls a été pointée du doigt à Washington. Faudra-t-il attendre une crise d’ampleur avant d’assister à une véritable mobilisation générale ? C’est à craindre.
(Les Echos 15/04/2019)